Sortir du trou… ou pas. De Don Lucho à Don Nico.
Publié le 14 Octobre 2010
Ce matin, le dernier mineur chilien, Don Lucho, est remonté à la surface. Don Lucho, son nom à la mine, s'appelle Luis Urzua. "Luis Urzua, 54 ans, était le chef d'équipe lorsque la mine s'est effondrée le 5 août, bloquant ces 33 mineurs à 625 mètres de profondeur. Il a pris les choses en main, organisé la vie du groupe et prévenu qu'il ne quitterait pas la mine tant que tous ses hommes ne seraient pas remontés sains et saufs à la surface …/… "
Je savais qu'il remonterait en dernier. Quand un homme est capable de tenir à bout de bras ses 32 compagnons d'infortune, quand un homme est capable de mettre en situation de survie un groupe dont il prend la tête, coupé du monde pendant 17 jours, alors que sa connaissance de la situation désespérée dans laquelle ils sont ne peut raisonnablement lui laisser beaucoup d'espoir, cet homme là va jusqu'au bout, et reste le dernier. Pour l'idée qu'il se fait de lui-même, de sa responsabilité. Pour rester un Homme, jusqu'au bout.
J'ai adoré ce sourire de plénitude qui m'est venu aux lèvres, cette sensation apaisante, exaltante, cette certitude enivrante que tant qu'il y a sur terre encore un seul être humain "comme ça", alors, l'humanité n'est pas foutue. Merci, Luis. Cela, c'était au Chili.
Chez nous, en France, il y a aussi un homme qui est au fond du trou. Un trou profond, qu'à l'instar de ces 33 mineurs, il a lui même creusé. Avec quels outils ? Oh, pas ses petites mains bien propres, et qui n'ont jamais bien touché quoi que ce soit qui ressemble de près ou de loin à un instrument de travail. Non. Pour creuser ce genre de trou, il a fallu seulement du mépris, de la condescendance, des mensonges, de la connivence, des liaisons indécentes et dangereuses. Il est seul, au fond du trou. Bien décidé à en sortir. A n'importe quel prix. Quitte à nous y précipiter, à nous marcher sur le ventre, à nous grimper sur la tête, à nous utiliser comme marche-pieds pour sortir, en premier, et nous oublier aussitôt. Dites "33", Monsieur Sarkozy, la fièvre monte, et si vous voulez sortir du trou, vous utiliserez les outils que vous maniez si bien. Vous pourrez même grimper, quitte à le briser, sur votre bouclier fiscal pour grappiller quelques mètres. Certaines mains charitables sont prêtes à vous jeter un incroyable filin de survie : l'ISF. Attrapez-le, ceux qui vous le tendent le valent bien, et savent qu'à votre tour, vous ne les laisserez pas tomber en ayant la délicatesse d'abandonner derrière vous ce filin si précieux. Et là, je me dis qu'il y a des trous qui ne sont jamais assez profonds.