Lettre à Edouard Martin
Publié le 18 Décembre 2013
Cher Edouard,
tes larmes de colère et de désespoir étaient vraies, ton combat et celui de tes camarades, juste. Mais la finance est une hydre et ses sept têtes, même coupées, repoussent toujours. Depuis le discours du Bourget, Hollande cherche encore l'adresse de son ennemi… myope comme une taupe ce pauvre garçon. Tu vois, tu n'es pas le seul à dire ou faire des conneries…
Tu n'avais pas vu d'un bon œil la proposition de Jean-Luc Mélenchon, alors candidat du Front de Gauche à la Présidentielle, d'une marche sur Florange. Tu ne voulais pas de récupération politique, disais-tu. Oh Edouard, entends-tu ceux qui se déchaînent aujourd'hui ? Tu vas en prendre la pleine tête, et cette fois, cela va te faire mal, car bon nombre de tes amis te tourneront le dos.
Putain, Edouard, tu ne l'as pas vu venir, le coup de Jarnac ? Tu viens de te faire récupérer : tu vas leur servir de locomotive, à ces socialistes qui ont enterré ton Florange, après que Sarkozy ait bien préparé le terrain. Tu n'es pas dupe, mais tu n'es pas de taille sur ce terrain là. Ils ne t'ont pas dit qu'un poste de député européen, à part constituer un poste de vigie, n'est en rien utile aux travailleurs dont tu faisais partie. Tu découvriras que le vrai pouvoir est entre les mains de la commission, pas entre celles de ceux qui, élus par les peuples, sont supposés représenter leurs intérêts. Ton nouveau Mittal se nommera Barroso. Et tu ne l'aimeras pas davantage, car lui aussi sert les intérêts de la finance et en plus il lèche les bottes du roi de l'acier ! Tu découvriras qu'à Bruxelles ou Strasbourg, tu seras encore plus impuissant qu'à Florange sous ton casque orange. Et cela te crèvera le cœur.
J'ai mal pour toi Edouard. Tu viens d'un pays et d'une génération où le mot "honneur" a un sens. Je sais que tu es sincère, je n'ai aucun doute sur ta loyauté. J'en ai bien davantage sur ta centrale qui signe les yeux fermés tout ce que lui présente le MEDEF et sur un pouvoir socialiste vautré dans ses contradictions et une allégeance pleine et entière à l'ennemi du Bourget. L'une comme l'autre te cracheront dessus quand tu ne leur seras plus utile.
Tu as fait une erreur Edouard, l'erreur de faire confiance. On la fait tous, cette erreur. Que celui qui n'a jamais été trompé se lève, et tous les autres, vos gueules ! Edouard, il y aura toujours une tasse de café pour toi dans ma bicoque de l'Allier. Pas seulement pour toi. Mais aussi pour toi.